Date/heure
30/03/2019
Catégories
Colloque transversal – Médiation et remédiation
Pessac, MSHA, 21 mai 2019
- Réception des propositions de communication (2500 signes) : le 30 mars 2019.
- Télécharger l’appel à contribution
La notion de médiation fait l’objet d’une attention croissante des chercheurs en SIC, l’approche théorique s’effectuant le plus souvent à partir des différents territoires de l’information, de la communication et de la culture. Ainsi distingue-t-on trivialement les médiations technologiques, pédagogiques, institutionnelles et culturelles, qu’elles soient envisagées dans le cadre de l’intime, du corps ou de l’urbain.
Pour SCHAEFFER (1970), la médiation se définit par un triangle de rapports entre public, producteur, auteur. Elle est, pour JOUET (1993), à la fois technique « car l’outil utilisé structure la pratique », et sociale « car les mobiles, les formes d’usage et le sens accordé à la pratique se ressourcent dans le corps social ». Dans un effort de synthèse, Davallon (2003) associe aux médiations trois lignes exploratoires selon que l’approche mette l’accent sur le langage (sémiologie, anthropologie, sociologie) ou sur les technologies. L’on peut voir à travers cette notion un moyen d’appréhender de façon complète le média, celui-ci étant à la fois un lieu de production du discours social, un espace de rencontre et d’interaction avec le public, le récepteur et les œuvres, carrefour aussi d’une multiplicité d’enjeux, politiques, économiques, artistiques ou sociétaux.
Le colloque transversal permettra donc de mieux saisir les pratiques de communication en les considérant comme un produit de la médiation (et non l’inverse) en dépassant les conceptions mécanistes. La médiation implique donc nécessairement une transformation de la situation, du dispositif communicationnel, des entités en présence. La notion de médiation a ceci de pertinent qu’elle offre la possibilité de focaliser sur les interrelations entre les éléments techniques et les éléments humains. Par exemple, les œuvres d’art ne sont pas des objets stables qui supporteraient une approche univoque et sûre. Au contraire, elles prennent des sens et des colorations esthétiques différentes selon les lieux qu’elles traversent et qu’elles informent à leur tour, ou selon les époques, provoquant des éclairages rétroactifs sur les œuvres du passé en même temps qu’elles bénéficient de cette compréhension nouvelle (ARASSE). La médiation peut alors être envisagée à l’aune de la plasticité de l’œuvre. Elle serait le processus de métamorphose entre les œuvres, ouvert au contexte. L’art en effet ne se contente plus d’être apprécié comme une production coupée du monde des usages, des supports et produits dérivés : il participe de l’atmosphère esthétique du monde. L’art invente des récits et des mises en fictions en des œuvres polyphoniques et polymorphiques qui appellent à interprétations plurielles.
La structuration du MICA entre SIC et Arts nous incite donc à questionner la notion de médiation dans toutes ses dimensions. Les objets d’étude des chercheurs du MICA suffisent à illustrer la diversité des transformations à l’œuvre et les questions qu’elles recouvrent. Prendre acte des médiations existantes oblige en effet à reconsidérer l’intersubjectivité, la relation et l’action des nouveaux dispositifs, les modifications des formes symboliques et des modes de construction du corps social. Les médiations doivent aujourd’hui assumer des médiations antérieures et les « refaire ».
L’idée de remédiation permettrait de saisir la médiation avec toutes ses implications. L’approche de Latour (1991, 2008) tend à reconsidérer le processus de la médiation comme un ajustement d’objets, un réaménagement des architectures et une réadaptation des villes à de nouveaux besoins. Associée au design « précautionneux » de l’auteur, elle s’inscrit en tout cas dans une généalogie débutant avec MOHOLY-NAGY (1947) qui réclame déjà un design « en relation avec les besoins de l’individu et de la communauté » et croise le redesign de BRANZI (2010). Ces divers déplacements terminologiques en interrogent donc quelques aspects implicites en soulignant à la fois un intérêt pour les modalités de la transformation médiatique, pour les transformations des objets, des sujets, des pratiques, des interactions et de l’environnement et pour les bénéfices de ces transformations.
Le passage de la notion de médiation à celle de re-médiation met en lumière un déplacement qui s’opère graduellement de l’action vers la réaction, de l’ajustement vers le réajustement, du formatage vers le reformatage, de la médiatisation vers la remediatisation, de l’information vers la réinformation. Ce glissement n’est pas anodin, il souligne la nécessité d’un rééquilibrage, d’une réorientation des politiques voire des stratégies informationnelles, communicationnelles, artistiques, esthétiques, digitales. Traiter de la médiation en la mettant en perspective avec la remédiation exprime la nécessité dans laquelle nous sommes pris de traiter d’une manière nouvelle la question des données, des algorithmes, de l’information, de la connaissance, de l’art, de la technique, de l’espace, du corps, du contemporain, du sens…
Mais la remédiation est aussi un espace où les possibles sont débarrassés d’une multiplicité d’entraves donnant lieu à la mise en œuvre de processus de reliance. La remédiation (qui signifie apporter un remède) est en fait, selon le psychologue de l’éducation VYGOSTKI, une « re-médiation ».
La remédiation peut être conçue comme une ré-interprétation dans le sens de la résilience (CYRULNIK). Il s’agirait de dégager les significations par un travail de réappropriation de ce qui s’est inscrit trop violemment, transformer la teneur de la trace, la remodeler, suivre la survivance de l’image (WARBURG).
L’on comprend donc que les domaines d’application sont nombreux, ils vont du management au développement économique et social. Mais il s’agit avant tout et surtout de lutter contre les violences, d’éviter les manipulations de tout genre, de réparer, de réguler, de réinventer le consensus, de dépasser les obstacles, de construire la mémoire de manière apaisée, de représenter la souffrance, de construire l’intelligence collective. La notion de remédiation peut ainsi s’entendre comme « réparation » au sens de souci du prendre soin (care), d’une attention à l’humain, impliquant non seulement de lui ménager une place participative active mais aussi créative. Il conviendra alors sans doute de distinguer, au sein des processus mis en jeu, ce qui serait de l’ordre de la créativité, de l’invention et de l’innovation. La portée critique de l’art sur les TIC comme sur les Humanités digitales pourrait permettre de réfléchir à une médiatisation comme forme de remise en cause constante. Mais on ne peut questionner la remédiation sans évoquer les notions de convergence, d’hypermédiation, de dé-médiation, d’hybridation, d’intermédialité et d’interopérabilité.
Dans un souci de transversalité, le regard des chercheurs devrait rester attentif à l’évolution des concepts, des pratiques et des méthodologies à la fois quantitatifs et qualitatifs.
Modalités pratiques
- Réception des propositions de communication (2500 signes) : le 30 mars 2019.
- Les propositions sont à adresser conjointement à Alain.Kiyindou@u-bordeaux-montaigne.fr et cecile.croce@iut.u-bordeaux-montaigne.fr
- Notifications d’acceptations : 12 avril.
Comité Scientifique
Noble Akam, Myriam Bahuaud, Franck Cormerais, Cécile Croce, Etienne Damome, Alain Kiyindou, Bernard Lafargue, Marie-Christine Lipani, Maria-Caterina Manes-Gallo, Annick Monseigne, Hélène Marie-Montagnac, Nayra Vacaflor.